REGARD SUR L'ACTUALITÉ — Le respeaking : un nouveau métier

Marimar Rufino Morales — Programme de doctorat en littérature

REGARD SUR L’ACTUALITÉ — Le respeaking : un nouveau métier

Appelé aussi sous-titrage vocal, le respeaking ou redite permet d’améliorer l’accessibilité pour les personnes sourdes ou malentendantes aux contenus télévisés au moyen de l’intelligence artificielle.

C’est installé dans un environnement exempt de bruit, muni d’un casque et d’un micro, que l’interprète reformule, depuis sa cabine, les propos qu’il entend à l’émission de façon à les rendre lisibles, une fois transcrits par un logiciel de reconnaissance automatique de la parole qui utilise l’apprentissage profond. La transcription est envoyée presque simultanément sous forme de sous-titres, et l’émission de télévision devient accessible aux personnes qui ne peuvent pas l’entendre. L’interprète doit écouter et parler en même temps, veiller à ne pas se distraire avec le son de sa propre voix, répéter sans délai et porter attention à ce qu’il redit (forme et contenu). La complexité cognitive de la tâche, loin d’être mécanique, nécessite l’apprentissage de bon nombre de stratégies. La répétition ou la reformulation de ce qu’il entend ne suffit pas, l’interprète doit aussi ajouter ou dicter les signes de ponctuation, l’information paralinguistique (bruits, musiques, applaudissements) ainsi que tous les mots absents du logiciel (expressions, noms propres). De plus, il doit anticiper et pallier les possibles erreurs de reconnaissance, telles que les homophones (est/et), tout en surveillant le texte résultant pour détecter et corriger des incohérences ou des erreurs, dans le but de rester fidèle au message original.

Au Québec comme ailleurs dans le monde, ce sont les entreprises qui ont fait les premiers pas en respeaking, grâce à des projets indépendants de chaînes de télévision comme TVA, en partenariat avec le Centre de recherche informatique de Montréal. Au moyen du respeaking, le discours oral est transformé en texte écrit en temps réel, et le spectateur a accès par écrit à l’information presque immédiatement. Aujourd’hui, le respeaking est devenu la méthode de transcription synchrone la plus rentable sur le marché.

Comme l’indique Pilar Orero dans Real-time subtitling in Spain. An overview (2006), les avancées en respeaking reflètent un modus operandi selon lequel elles ont été propulsées par l’industrie d’abord, avant que le monde de l’enseignement ne finisse par se mettre à jour en étudiant le phénomène. Si dans les années 2000, les entreprises devaient former leurs locuteurs, depuis 2007, bon nombre d’universités offrent des cours dans le cadre des spécialisations en traduction audiovisuelle. Ainsi, la collaboration industrie-université permet d’orienter les efforts vers la qualité plutôt que sur la quantité. À l’Université de Montréal, des projets pilotes propulsés par des doctorants continuent de faire avancer le champ.

À l’instar de la télévision, le respeaking direct rend le discours oral de n’importe quel événement accessible en temps réel. Pour sa part, le respeaking différé optimise les transcriptions aussi bien d’un procès-verbal que des entrevues qui serviront à créer un corpus linguistique. Dans les deux cas, la transcription peut être fournie dans la langue de départ ou dans une autre langue, laissant entrevoir de nombreuses avenues pour ce métier émergent. 
 

La terminologie pour désigner en français le terme respeaking est encore en évolution. Dans les milieux francophones, « sous-titrage vocal » ou  « sous-titrage en direct » sont employés. Or, il n’y a plus de sous-titres lorsque cette technique est utilisée pour transcrire en différé. C’est pourquoi des efforts sont réalisés pour normaliser le terme « redite » comme identificateur unique en français.

 

 

 

 

 

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